Or, dans l’hypothèse ou Benazir Butto (2 novembre 2007) n’aurait pas fait de lapsus *et* était correctement informée, cela voudrait effectivement dire que Oussama Ben Laden serait mort depuis …fin 2001, début 2002 au plus tard, puisque son assassin présumé est en prison depuis cette date.Peu probable ! Non seulement un certain nombre de témoignages (dont ceux de soldats français) semblent prouver le contraire, mais il faudrait que toutes les vidéos de Ben Laden aient été enregistrées avant fin 2001, et surtout, il faudrait admettre que l'état de santé de Ben Laden (que l'on sait de celui-ci par rapport aux premières vidéos s'est fait en à peine quelques mois. Difficilement imaginable.
Les mobiles pour lesquels Ben Laden aurait pu être assassiné par un autre musulman, ne manquent pas. En accélérant la perspective du rétablissement du Califat, il a aiguisé les appétits des responsables politiques et religieux musulmans. A commencer par ceux de tous les dirigeants de pays islamiques, sunnites ou chiites, et d’abord les principaux d'entre-eux: ceux dArabie Saoudite, du Pakistan, d'Iran., de Syrie, de Lybie, etc. mais aussi les challengers, les « free-lance » qui se profilent à la faveur du djihad mondial. A cet égard, la pseudo "laïcité" de certains pays et dirigeants arabes ne doit pas non plus faire illusion. Ainsi, dans ce domaine comme dans d'autres, Saddam Hussein était un précurseur. En 1990, donc bien avant la première guerre du Golfe, il fait bâtir en Irak des mosquées pharaoniques et se fait appeler le nouveau Saladin du monde arabe, soutient les "martyrs" palestiniens, et s'empare du Koweït, non simplement pour une raison de frontières historiques, comme on le dit par erreur, mais comme première étape vers l'appropriation des lieux saints, base indispensable à l'établissement de « son » califat. Bien qu'il ait permit à des cellules sunnites d'AL Qaeda de s'entraîner en Irak en 2002/2003, Saddam Hussein, était bien, à ce titre, un rival (précoce) de Ben Laden.
Saddam Hussein était donc un rival « laïque », ou, plus exactement islamo-laïque de Ben Laden, tout comme l'était, (et l'est encore, dans l'hypothèse improbable ou Ben Laden serait encore en vie) Pervez Musharraf , l'actuel président du Pakistan, un autre candidat « laïque » au titre de Calife. Ou encore, Recep Tayyip Erdoğan, actuel président de la Turquie.Dans un tout autre style, son adversaire (et un autre candidat au titre de Calife), Akbar (Hachemi Bahrémani) Rafsandjani, le véritable patron (*) de la mollacratie iranienne, est lui, un islamo-mollah version khomeyniste qui mise, lui sur la tradition chiite revisitée par le khomeynisme pour arriver à ses fins). Mais on en trouve bien d’autres. A commencer par les islamistes traditionnels, chiites ou sunnites. Comme, par exemple, l’islamo-royaliste sunnite Abdallah d'Arabie Saoudite, qui inonde l'occident de pétrodollars pour consolider le wahhabisme en occident. Et, bien entendu la kyrielle de petits islamo-mondialistes que Ben Laden a inspiré, et qui sont tellement pressés d’en découdre directement avec l’Occident, dans un grand djihad mondial, qu’ils ne prennent même plus la peine de commencer par le passage obligé : le renforcement de l’islam au sein de nations arabes (et des nations vassales noires d’Afrique) qu’elles soient islamo-nationalistes ou islamo-royalistes, d’obédience shiite ou sunnite.
(*) mollacratie ou théocratie des mollahs, sous les dehors d’une « république islamique » dont, contrairement à ce que nous disent les médias désinformateurs, le président Ahmadinejad n’a qu’une fonction symbolique, destiné justifier l’appellation « république », et n’est qu’une marionnette comme une autre dans le spectacle de Grand Guignol que nous joue en permanence celui qui déteint les vraies clés du pouvoir en Iran, Rafsandjani.
Bref, qu'ils soient islamo-laïques, islamo-nationalistes, islamo-socialistes, islamo-traditionnalistes, (version royaliste sunnite ou version « république » des mollahs shiites comme Rafsandjani), ou encore d’autres islamo-internationalistes comme Ben Laden lui-même, ils sont tous engagés dans une guerre intra-musulmans qui a pour enjeu pour la suprématie de leur faction, dans la perspective du rétablissement du Califat, une guerre féroce, qui ne fait pas de quartiers.
La carcasse de Ben Laden pourrit sans doute quelque part...
Ben Laden, à la recherche de qui Benazir Bhutto prétendait partir lors d’une interview, est sans doute mort depuis un bout de temps déjà. Souffrant d’importants problèmes rénaux nécessitant des dialyses, constamment contraint de mener une vie cachée, tant pour échapper aux américains qu’aux chasseurs de primes et surtout, à ses coreligionnaires, motivés tant par la perspective de faire main basse sur sa fortune, que par celle de prendre sa place, les chances qu’il ait pu se faire soigner correctement pendant ces sept années sont minces. La dernière vidéo, qui nous montre un homme en état de délabrement physique avancé (et non pas « en bonne santé » comme le prétend l’Agence de Falsification de Presse AFP, qui, décidément, n’aura jamais les yeux en face des trous) en apporte l’éclatante confirmation. A moins qu’il n’ait été assassiné par un autre musulman. Un autre musulman islamo-internationaliste adepte du djihad mondial comme lui, comme semblait le penser Benazir Bhutto. Ou un musulman islamo-laïque, un musulman islamo-nationaliste, un musulman islamo-socialiste, un musulman islamo-agent secret de l’ISI, un musulman islamo-traditionnel Sunnite, un musulman islamo-traditionnel Chiite, un musulman islamo-quelque chose, (bref un autre musulman quoi !) pour de sourdes raisons de luttes intestines et/ou de racket.
Benazir Bhutto avait-elle la moindre chance en revenant au Pakistan ? ...
Certes, en s’intéressant de trop près aux islamistes (ici dans le sens de : musulmans engagés dans le djihad mondial), mais aussi à un certain nombre de secrets de l’ISI, (dont les membres sont eux-mêmes intriqués dans les diverses factions, à vocation nationaliste (au sens large : pseudo-laïques ou pas) ou internationalistes de l’islam (et portent parfois plusieurs casquettes), Benazir Bhutto n’améliorait pas ses chances de survie. Sa volonté de pourchasser les islamistes, avec l’aide des Etats-Unis si nécessaire, lui a valu bien des ennemis, y compris chez les fils de Ben Laden. Et elle s’en fait d’autres en demandant à la communauté internationale de cesser de soutenir le président Musharraf et en réclamant sa démission. Après avoir échappé le 18 octobre 2007, le jour même de son retour au Pakistan à un attentat, elle sera assassinée deux mois et demi plus tard, le 27 décembre.
Mais même en faisant l’impasse sur ses imprudences (et la campagne de calomnie dont elle a fait, en partie injustement, l'objet) une femme pouvait-elle encore penser sérieusement pouvoir diriger un pays islamiste aujourd'hui ? des musulmans pourraient-ils encore s’enorgueillir, dans un désir de fierté, un désir mimétique de copier l’occident dans sa modernité, de mettre à sa tête une femme ?
Répondre par l’affirmative serait oublier qu’aujourd’hui, ce ne sont plus seulement quelques zones tribales à la frontière de l’Afghanistan qui sont incontrôlées, mais de très larges pans du territoire. Ce serait oublier l’affaire révélatrice de la Mosquée Rouge, ce serait oublier que ce pays (qui dispose d’un arsenal nucléaire) est gangréné à un niveau inouï par le djihadisme, qui a pénétré profondément toutes ses institutions, et jusqu'à ses services secrets, rouage essentiel de la sécurité d'un pays qui dispose du feu nucléaire, et menace le pays d’implosion. Et ce serait oublier que cette fragile modernité que représentait encore le nationalisme (*) au Pakistan il y a encore une dizaine d’années a volé en éclat sous les coups de boutoir du fanatisme de l’islam le plus archaïque, déchaînant le barbarisme des masses aveugles.
(*) Même si nous avons vu que, bien qu’en situation concurrente, le nationalisme et l’islamisme sont, en terre d’islam, des réalités non pas antinomiques mais idéologiquement liées, comme nous la remarquablement montré Lucien-Samir Oulahbib, et que le nationalisme arabe (mais aussi pakistanais, etc.) n’est en réalité qu’un islamo-nationalisme.
Non, décidément, Benazir Bhutto, pourtant deux fois premier ministre du Pakistan (du 29 mai 1988 au 6 décembre 1990, et du 19 octobre 1993 au 5 novembre 1996) n’avait aucune chance de devenir présidente !
Et encore moins de le rester !
Egger Ph.