"Le mensonge et la crédulité s'accouplent et engendrent l'Opinion" Paul Valéry

1 septembre 2009

Critique du livre « 11-Septembre : Les Vérités cachées »

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A la veille du huitième anniversaire des attentats du 11 septembre 2001, Eric Raynaud, journaliste indépendant, publie 11-Septembre : Les Vérités cachées aux éditions Alphée. Un livre très favorable aux Truthers, qui réclament une nouvelle enquête, réellement indépendante, sur les attentats les plus meurtriers de l’histoire des Etats-Unis.


Faits bruts et vérifiables

Un livre qui prétend s’appuyer sur du solide (page 25) : "Dans cet ouvrage, je m’attache essentiellement à deux choses. Montrer que les tenants de la version officielle du 11-Septembre sont, aujourd’hui, dans une position absolument intenable. Je ne l’ai pas décrété : j’ai pris le parti d’aligner des faits, des études, des expertises et des témoignages incontestables, pris aux sources les plus fiables, tous vérifiés et totalement vérifiables par le lecteur."

Eric Raynaud, qui n’est lui-même expert en rien, se base en effet sur des avis d’experts, en de multiples domaines. Ceux-là mêmes que l’on retrouve sur le site PatriotsQuestion9/11 : à ce jour, 200 politiques, militaires et agents du renseignement, 700 ingénieurs et architectes, 200 pilotes professionnels, 400 universitaires, 200 artistes et professionnels des médias, sans parler des 230 survivants et membres des familles de victimes du 11-Septembre.

"Pour en terminer, poursuit Raynaud, je m’attacherai à montrer que, de toute évidence, le Mouvement pour la vérité sur le 11-Septembre a percé une brèche dans le mur de mensonges de l’administration Bush que personne, jamais, ne pourra refermer. La science reste la science, et personne ne peut aller contre, y compris avec la plus totale mauvaise foi."

Raynaud reprend ici à son compte l’inébranlable confiance en la science de Niels Harrit, ce scientifique danois, qui, avec huit collègues, a produit, le 3 avril 2009, une étude qui démontrerait (ou démontre, là est la question) la présence de nanothermite non activée dans les poussières du World Trade Center. Un explosif de dernière génération, produit exclusivement par l’armée, selon Harrit. Cette découverte, dont Eric Raynaud ne doute pas de la réalité, constitue, selon ses mots, "une bombe atomique pour la version Bush-Cheney". Une bombe que l’architecte Richard Gage fit retentir, le 28 mai 2009, sur KMPH, une chaîne du groupe Fox TV.


Des preuves ?

On sent qu’au terme de ses recherches, l’auteur des Vérités cachées s’est forgé un avis bien tranché sur l’ensemble du dossier. Selon lui, aucun avion de ligne ne s’est écrasé sur le Pentagone, et les Twin Towers, ainsi que le WTC 7, ont été dynamités. Quant à Ben Laden, il a toutes les chances d’être mort depuis fin 2001.
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A-3 Sky Warrior
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Au sujet du Pentagone, l’auteur conclut ainsi (p.123) : "On le voit, la version officielle selon laquelle le Boeing 757 s’est écrasé contre le Pentagone ne tient plus la route un instant, après pas loin de huit années de recherches, et les nombreuses déclarations, plus récentes, de gens très hautement qualifiés pour en parler. Non, définitivement, non, aucun avion de ligne ne s’est crashé sur l’édifice le plus sécurisé du monde." La partie consacrée au Pentagone est d’ailleurs la plus consistante du livre. Pas moins de 70 pages sur 300.

Reprenant l’enquête de Barbara Honegger *, journaliste spécialisée dans les affaires militaires, Raynaud avance même une hypothèse sur ce qui aurait pu réellement frapper le Pentagone : "Des débris trouvés dans le Pentagone ont été identifiés comme étant des pièces de compresseurs d’un moteur turbo JT8D, utilisés pour les avions de combat A-3 Sky Warrior – normalement pilotés par un aviateur. Or, on sait que des A-3 Sky Warrior ont été modifiés secrètement, pour en faire des drones équipés de missiles. C’était dans les mois précédant le 11 septembre 2001, lors d’une opération militaire très compartimentée, au Loveland Municipal Airport, près de Fort Collins, Colorado."
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* Barbara Honegger, une journaliste réputée aux États-Unis, c’est elle qui a mis à jour le scandale de l’Irangate notamment. Barbara Honegger travaille actuellement pour le Pentagone justement. Elle est responsable de la communication du Pentagone. Eh bien, Barbara Honegger a pu rencontrer, dans le cadre de son nouveau poste, tous les intervenants du Pentagone et elle a eu accès à tous les documents internes de la maison. Elle a eu accès à la propre enquête que le Pentagone a mandatée en interne sur cette attaque. Qu’a dit Barbara Honegger suite à son propre travail d’investigation ?
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Elle a dit que tout le monde s’est posé les mauvaises questions au sujet de l’attaque du Pentagone, car l’important n’était pas de savoir ce qui était tombé sur le Pentagone, un avion de chasse, un missile ou un Boeing, mais bien de comprendre ce qui s’était passé à l’intérieur même du Pentagone, ce qui n’est pas la même chose. Dans l’enceinte même du Pentagone, on le voit très bien sur toutes les vues aériennes du bâtiment, on voit qu’il y a cinq anneaux constitutifs en partant du centre du Pentagone. La « chose » qui a percuté le Pentagone a donc détruit les trois premiers anneaux, le 5ème, le 4ème, et le 3ème. Or, la plupart de ceux qui sont morts au Pentagone durant l’attaque ont été tués dans le premier anneau du Pentagone, ce qui n’avait rien à voir avec l’attaque.
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De quoi sont-ils morts alors ?

Toutes les horloges internes du Pentagone se sont arrêtées précisément à 9 h 32. Les horloges internes s’arrêtent automatiquement en cas d’explosion. Or l’impact sur le Pentagone est arrivé à 9 h 37, donc 5 minutes après. Tous les témoignages de gens qui se trouvaient alors à l’intérieur de l’ édifice ont ensuite relaté une odeur de cordite. Ce sont des témoignages concordants. La cordite est un matériel important qui intervient dans la fabrication des bombes. Et on retrouve chez certains témoins l’utilisation du terme « bombe » pour relater les faits. Les rapports internes du Pentagone parlent d’une bombe, mais pas le rapport officiel de la commission d’enquête.
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Sur les vidéos, on voit nettement Donald Rumsfeld, patron du Pentagone, faire « le brancardier »…
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Eh oui (rires)… Car à ce moment précis, tout le monde ignore ce qui se passe dans le ciel, Rumsfled devait s’occuper de la défense du pays et on le voit aider à transporter les blessés… C’est ahurissant. Il aurait dû se trouver à un poste de commandement, et non devant le Pentagone à transporter les blessés. Brancardier, ce n’est pas son métier, si ?
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La thèse officielle parle de l’écrasement d’un Boeing d’une ligne régulière. Si ce Boeing ne s’est pas écrasé sur le Pentagone, qu’est-il devenu avec ses passagers ?
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Je l’ignore. Cependant, jamais personne n’a vu les corps des passagers, même pas les familles des victimes. Les familles ont su qu’il s’agissait de leurs parents grâce aux tests ADN, mais à aucun moment ils n’ont eu accès aux corps des victimes. Les corps ont été reconnus grâce aux empreintes ADN, mais personne ne les a vus.
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Cet avion a bien existé ?
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Oui, tout à fait. Les passagers ont bien pris cet avion. Qu’est-il devenu ? Je n’ai pas de réponse. Où est-il passé ? Sont-ils morts ? Ou vivants ?
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Vous parliez du système de défense du Pentagone, en théorie, aucun avion ne peut franchir une ligne invisible située autour du Pentagone…
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Aucun avion ne peut transpercer cette ligne sauf si on l’autorise à passer…

Le livre est documenté, les démonstrations assez convaincantes, même si l’on n’est pas obligé d’y adhérer toujours. Il s’agit de faire ou non confiance à ceux qui les produisent, dans la mesure où l’on n’est pas capable de les comprendre soi-même (c’est le cas, souvent, lorsque la science rentre en jeu, et cela reste délicat. Pour ma part, je garde mon jugement suspendu). Je vous laisse les découvrir vous-mêmes : 11-Septembre : Les Vérités cachées se lit vite et bien, et on ne le lâche pas des mains une fois qu’on l’a ouvert. Les familiers du 11-Septembre, soyons honnêtes, n’y apprendront pas grand chose de neuf. Le livre n’offre pas de scoop, pas d’information inédite. Mais il récapitule, de manière très accessible, les principaux points caducs de la version officielle, et les "preuves", selon l’auteur, de leur fausseté.
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Eloge du Web

Ces informations sont, pour la plupart, notons-le, déjà accessibles sur Internet. Et certains pourront regretter qu’en dehors de deux interviews exclusives de David Ray Griffin et Niels Harrit, l’auteur se soit contenté de compiler des informations déjà existantes (on est loin ici d’Eric Laurent, de ses enquêtes de terrain, et de ses récits fouillés). Mais à cela, on peut rétorquer que les informations du Net sont déjà tellement nombreuses qu’il y a fort à faire avec elles, et qu’on ne peut même pas les survoler toutes dans un ouvrage qui se veut digeste et accessible à tous. Raynaud le dit lui-même (page 299-300) : "J’aurais pu rédiger cinq ou six ouvrages sur le sujet, avec ce que l’on sait aujourd’hui de ces événements (…) J’ai pris le parti, dans celui-ci, de m’attacher à la genèse de ce tournant dans l’Histoire du monde. Les faits du 11-Septembre, bruts de décoffrage, mais revus avec près de huit ans de recul et, surtout, des données, des informations, des analyses et autres expertises accumulées au fil du temps".
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Internet a joué un rôle considérable dans l’enquête du 11-Septembre, et Raynaud rend justement hommage à ses chercheurs amateurs. Il salue, page 13, "l’avènement du Web 2.0", sans lequel la découverte rapide des divers mensonges officiels aurait été impossible : "Le Mouvement a pleinement utilisé ces capacités nouvelles et formidables de communication et d’échange, pour mettre au grand jour ses investigations et ses découvertes, les partager, les compléter en concertation, les publier, etc." Page 16, il poursuit : "L’opinion publique n’est pas aussi "panurgienne" qu’on veut bien le croire… Pas d’infos dans les grands médias, ou bien des informations tronquées, voire déformées ? Très bien : Internet propose aujourd’hui des médias tout à fait crédibles, riches en infos, à la liberté de ton totale, interactifs et qui plus est… gratuits.
Aujourd’hui, n’importe quel gouvernement peut museler n’importe quel média traditionnel dominant, mais rien ne peut empêcher le citoyen qui en a le désir et la volonté de s’informer autrement."

Eric Raynaud, s’il fait surtout référence à des sites spécialisés dans le 11-Septembre, renvoie également à AgoraVox vers la fin de son ouvrage.
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Grands médias : le passage obligé

Cela dit, si les médias alternatifs sont loués, l’auteur est sans doute conscient que la "vérité en marche" n’ira pas bien loin sans l’implication des grands médias traditionnels. D’où cet appel de Niels Harrit, page 290 : "Les médias n’ont pas encore réagi. C’est le devoir du public de leur dire que s’ils continuent à mentir plus longtemps, ils vont perdre le peu de crédibilité qu’il leur reste. Qui ne dit mot consent ! Posez des questions, ayez confiance en vous ! Ce n’est pas si compliqué. Le 11 septembre 2001, il y avait deux avions, mais trois gratte-ciel détruits. Vous n’avez pas besoin d’être un scientifique pour compter jusqu’à trois… Tout le monde devrait mettre la pression, et demander la vérité dans la presse. Ceci est très sérieux. Chaque action compte, peu importe qu’elle soit mineure. Le point essentiel selon moi, c’est que tout le monde ment ou a peur. Alors on doit avoir confiance en soi ; ce n’est pas si difficile…".

Eric Raynaud pourra s’employer à défendre son point de vue chez Franz-Olivier Giesbert, sur France 2, dès le 11 septembre prochain. Un terrain difficile à coup sûr, quand on connaît l’hostilité de F.O.G. aux mal nommées "théories du complot" (car la version officielle est, rappelle Raynaud, elle-même une théorie du complot) : l’animateur avait en effet, l’an passé, fustigé Internet et ses sites sur le 11-Septembre, rebaptisés pour l’occasion Débile.com et Maboul.fr… Et puis Giesbert n’est pas Taddeï : pas le genre à laisser parler longuement ses invités, plutôt le genre à hacher, voire broyer les conversations.

A la même heure, sur la chaîne cryptée, on pourra visionner 11 septembre : Enquête sur la théorie du complot, un documentaire signé Stéphane Malterre, qui se penchera sur "le discours de personnalités telles que Sharon Stone, Jean-Marie Bigard ou encore Jean-Marie Le Pen", et qui continue à "alimenter la paranoïa populaire contre les gouvernements".

Malterre, qui avait reconnu, l’an passé, dans Arrêt sur Images, n’avoir lu qu’en partie le livre d’un homme, David Ray Griffin, qu’il mettait pourtant fortement en cause dans son film, diffusé en avril 2008, et que l’on aura donc le bonheur de revoir, peut-être dans une version améliorée, cette année… Quant à Daniel Schneidermann, qui organisant le débat, il reconnaissait n’avoir pas vu le documentaire 9/11 Press for Truth, qui constitue pourtant le passage obligé pour qui veut rentrer du bon pied dans l’histoire du 11-Septembre ; le journaliste consciencieux s’étant contenté du très imparfait Loose Change 2… Pour une mise à jour, si l’on veut rester braqué sur la série à succès de Dylan Avery : Loose Change Final Cut.

Notons que c’est par l’évocation du combat des Jersey Girls, qui constitue le prémisse de 9/11 Press for Truth, que Raynaud entame son ouvrage (les Jersey Girls sont ces veuves du 11-Septembre parties en guerre contre l’administration Bush, si réticente à lancer une enquête sur les attentats). C’est encore par celle du travail colossal de Paul Thompson, avec sa chronologie archi détaillée du 11-Septembre. C’est là, bien sûr, le bon départ.

A noter encore que le livre d’Eric Raynaud a reçu une critique plutôt bienveillante de la part de Paul Wermus dans France Soir. "Entre l’angélisme béat et les thèses conspiratrices se trouve peut-être la vérité", écrit-il. Avant de reprendre la citation, optimiste, qui clôt le livre : "Comme disait Racine : « Il n’est pas de secret qui résiste au temps. »"
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Sans liberté de blâmer, il n’est pas d’éloge flatteur

Je formulerai tout de même, pour finir, quelques bémols à ce livre d’Eric Raynaud, qui comporte des petites coquilles, une poignée d’erreurs ou d’imprécisions, certes sans grandes conséquences, mais toujours regrettables, et des citations parfois approximatives.

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Citations
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Ainsi, quand Raynaud évoque, page 227, le rapport du PNAC de septembre 2000, il déforme, pour l’expliciter peut-être, la fameuse citation controversée originale : "En 2000, écrit-il, ce think tank expliquait que ce projet [de domination mondiale des Etats-Unis] pourrait se montrer long à réaliser, l’opinion publique étatsunienne n’étant pas favorable à de nouvelles aventures guerrières. Ajoutant, tenez-vous bien : "Sauf à ce qu’un élément moteur n’advienne, du type Pearl Harbor, qui retournerait l’opinion et permettrait de passer immédiatement à l’action"."
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L’ennui, c’est que la phrase originale ne fait pas la moindre allusion à l’opinion publique qu’il s’agirait de retourner. Page 51 du rapport, il est écrit : "Le processus de transformation, même s’il est porteur de changements révolutionnaires, sera probablement long, en l’absence d’un événement catastrophique et catalyseur comme un nouveau Pearl Harbor". L’idée de retourner l’opinion avec un tel événement est certes sous-jacente, implicite, mais elle n’est pas expressément formulée.
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De même, Raynaud ne met pas un instant en doute la parole de Benazir Bhutto, lorsque, deux mois avant sa mort, elle lance à David Frost, sur Al-Jazira, que Ben Laden a été assassiné par Omar Sheikh. La précision dans la citation est ici déterminante. Raynaud cite ainsi Bhutto, page 266 : "Oussama Ben Laden a été assassiné, par un ancien membre des services secrets pakistanais, Omar Sheikh." Ce qu’il présente comme une "confidence" de l’ancien Premier ministre pakistanais, qui aurait même pu être cause de son assassinat. Or, chacun peut le vérifier, Bhutto ne dit pas cela, mais, finissant sa phrase : "… et il a aussi été impliqué avec Omar Sheikh, l’homme qui a assassiné Oussama Ben Laden". La différence n’est pas anodine : car, ici, Ben Laden n’est pas le sujet de la phrase, on ne parle pas de lui au départ. On parle d’abord de Omar Sheikh, et ce dernier est connu pour être l’assassin du journaliste Daniel Pearl.
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L’hypothèse du lapsus ("Ben Laden" prononcé malencontreusement à la place de "Daniel Pearl") redevient alors crédible. Alors qu’elle ne l’est aucunement si l’on se fie à la citation de Raynaud.
Marie-France Calle, journaliste au Figaro, spécialiste du sous-continent indien, que j’avais interrogée à ce sujet, m’avait répondu : "En ce qui concerne l’une des dernières interviews de Benazir Bhutto (1 mois et demi avant son assassinat), dans laquelle elle déclare que Sheikh Omar a tué Oussama ben Laden, j’ai tendance à penser, comme vous, qu’il s’agit d’un lapsus. Il est d’ailleurs étonnant que David Frost, le journaliste qui l’interrogeait, ne l’ait pas relancée sur ce point. Je viens de visionner une fois encore la vidéo que l’on peut voir sur Youtube. Au-delà de cette vraie ou fausse "révélation" sur ben Laden, j’ai été frappée par l’actualité et la justesse de l’analyse de Benazir sur le Pakistan et le terrorisme…" Clairement, il y a ici un doute.
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Omission
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Toujours au sujet de la mort possible, voire "plus que probable" (page 269), de Ben Laden, dès la fin de l’année 2001, Eric Raynaud compile nombre d’informations qui vont, en effet, dans ce sens. Mais il omet un témoignage qui peut remettre en cause cette version : celui des soldats français du COS (Commandement des opérations spéciales) en Afghanistan, que nous rapportent les grands reporters Eric de Lavarène et Emmanuel Razavi dans leur documentaire Ben Laden, les ratés d’une traque (20e minute). A six mois d’intervalle, ils auraient eu Ben Laden à portée de tir, sans recevoir le feu vert des Américains pour agir. Un soldat français déclare : "Je peux en attester : en 2003 et en 2004, nous avions Ben Laden dans la lunette."
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Selon Infosoir du 22 décembre 2006, les deux journalistes ont interrogé quatre soldats français des forces spéciales qui ont tous donné la même version des faits. Là encore, le doute.
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Erreurs
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Doute en revanche inutile lorsque Raynaud évoque, page 266, une possible rencontre entre Mahmoud Ahmad, le chef de l’ISI et possible financier du 11-Septembre, et George Tenet, le patron de la CIA : "Détail intéressant : le même Mahmoud Ahmad était à Washington aux environs du 11-Septembre, où il aurait rencontré de hautes personnalités de l’administration Bush, dont George Tenet, le patron de la CIA, et Condoleezza Rice, conseillère à la sécurité nationale. Interrogés sur cette question, tous les deux démentirent l’information…". En fait, George Tenet a bel et bien rencontré Mahmoud Ahmad, le 9 septembre 2001… Il le raconte d’ailleurs lui-même dans ses Mémoires parus en 2007, et ne nie donc en rien l’information. D’autres rencontres sont tout aussi avérées, et pas du tout cachées : avec Mark Grossman, Richard Armitage, Porter Goss, Bob Graham… En revanche, il est vrai que Rice a démenti, le 16 mai 2002, toute rencontre avec Ahmad.

Raynaud écrit encore, page 277 : "Quant au financement du 11-Septembre, il est acquis aujourd’hui que c’est l’Arabie Saoudite amie des Etats-Unis qui en est à l’origine. Un traçage bancaire prouve d’ailleurs qu’elle a fourni les 100.000 dollars donnés à Mohammed Atta, par l’intermédiaire d’Omar Sheikh, et avec la bénédiction de Mahmoud Ahmad…"
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S’agit-il d’une simple coquille ? L’argent qu’aurait fait transférer le chef de l’ISI à Atta ne provient pas d’Arabie Saoudite (bien que celle-ci constitue sans doute une autre source de financement) ; selon le Times of India du 14 février 2002, cet argent émanerait d’une rançon payée au gangster indien Aftab Ansari, suite à un kidnapping. Notons que, page 221, Raynaud écrit, en contradiction avec la citation précédente, que Mahmoud Ahmad a ordonné l’envoi des 100.000 dollars à Atta "par l’intermédiaire de l’Arabie Saoudite". De source, l’Arabie Saoudite devient ici intermédiaire…
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On peut noter une autre erreur dans la foulée, page 277 : "Après l’élection d’Azif Zardari à la tête du Pakistan, du reste, Mahmoud Ahmad sera poussé à une retraite qui semble être très tranquille pour lui." Azif Zardari est élu président du Pakistan le 6 septembre 2008. Mahmoud Ahmad est démis de ses fonctions à la tête de l’ISI par Pervez Musharaff le 8 octobre 2001. La chronologie en prend ici un sacré coup.

Page 286, Raynaud écrit que le scientifique Steven Jones a enseigné "à la très réputée Brighton University", alors qu’il semble plutôt que ce fut à la Brigham Young University.

Enfin, page 292, il est écrit que "les chiens renifleurs d’explosifs avaient été retirés du WTC… quinze jours avant les attentats". Pour être précis, ils ont été introduits dans les tours à la fin du mois d’août, et retirés le 6 septembre.

Elle ne tient qu’à un fil. Ces quelques remarques, qui se focalisent surtout sur un seul des dix chapitres, ne remettent pas en cause l’ouvrage dans son ensemble, qui est une bonne introduction au débat sur le 11-Septembre. Mais ces approximations, dans lesquelles nous pouvons tous tomber par mégarde, précipitation, et, pourquoi pas, passion, doivent sans doute nous tenir éloignés de trop grandes certitudes. Car un jugement basé sur des erreurs, aussi minimes soient-elles, peut finir par nous emmener bien loin du but recherché : la vérité.
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Taïké Eilée