"Le mensonge et la crédulité s'accouplent et engendrent l'Opinion" Paul Valéry

28 février 2012

Le petit secret des Tours Jumelles

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Même ceux qui connaissent bien l’histoire des Etats-Unis et qui parviennent à envisager que le 11-Septembre ait pu être un auto-attentat, se posent parfois cette question: « D’accord pour se faire du mal à soi-même, mais pourquoi aller détruire deux des plus merveilleux joyaux que l’Amérique possédait ? Ils ne pouvaient pas détruire autre chose ? »

En réalité, les Tours Jumelles étaient très loin d’être de merveilleux joyaux.

En plus d’être situés sur l’un des terrains les plus convoités et rentables du monde, après 30 ans, les deux bâtiments étaient devenus totalement obsolètes. Chaque étage formait un grand espace de plus de 4000 m2, et l’augmentation des coûts énergétiques avait rendu les deux édifices extrêmement difficiles à chauffer en hiver et à refroidir en été. Le périmètre du World Trade Center Plazza représentait en outre un véritable casse-tête pour le trafic automobile au beau milieu de Downtown Manhattan, un quartier de la ville dont la construction avait commencé au début du siècle dernier, et qui était constitué de petites rues étroites. Les chauffeurs de taxi racontent qu’aux heures de pointe, il leur fallait plus d’une heure pour faire le tour du World Trade Center.

Mais le principal problème des Tours Jumelles était celui des énormes quantités d’amiante qu’elles contenaient. Construites à une époque (1969-1973) où l’amiante n’était pas encore interdit, ce composé fut utilisé à la fois pour la protection anti-incendie des structures en acier, et pour isoler les conduites d’air conditionné et d’eau.

C’est seulement au début des années 1970 que l’amiante a été reconnu comme substance cancérigène, mais la construction des Tours Jumelles était alors pratiquement terminée. On ne sait pas précisément jusqu’à quel moment de la construction il a été utilisé, ni la quantité exacte contenue dans les Tours, mais les estimations donnent un total variant entre 400 et 5000 tonnes d’amiante dans les Tours jumelles, une fois leur construction terminée.

Au fur et à mesure qu’apparaissaient de nouveaux règlements contre l’amiante, la situation des Tours Jumelles devenait de plus en plus délicate, jusqu’en 1989, lorsque l’amiante fut définitivement interdit pour toutes les constructions civiles. On essaya alors une solution de fortune, en recouvrant l’amiante des Tours Jumelles à l’aide un ciment particulier, pour éviter la dispersion de particules dans l’air.

Mais vers la fin des années 1990, de nouvelles règles prévoyaient que, quel que soit l’endroit où l’on intervenait pour effectuer des réparations ou des travaux d’entretien, l’amiante en place devait être évacué dans sa totalité.

Entre-temps, justement à cause de sa dangerosité, les coûts de l’enlèvement de l’amiante étaient devenus astronomiques, puisqu’il fallait au préalable faire évacuer tous les étages concernés, et faire appel à des ouvriers spécialisés qui devaient travailler avec des combinaisons hermétiques et des bombonnes d’oxygène.

Appeler le plombier pour réparer une fuite, c’est une chose, mais c’en est une tout autre de devoir évacuer un étage complet, avec des dizaines de sociétés commerciales qui perdent de l’argent à chaque minute qui passe, et d’appeler une équipe d’astronautes pour faire le travail de plomberie. À la fin des années 1990, les devis pour l’enlèvement et l’élimination de l’ensemble de l’amiante des Tours Jumelles se montaient à un milliard de dollars – plus ou moins le prix qu’aurait coûté une nouvelle tour.

Dans une tentative désespérée, la Port Authority de New York, propriétaire des Tours Jumelles, porta réclamation auprès des compagnies d’assurance qui refusaient de couvrir les coûts de ces travaux d’enlèvement, mais au bout d’une longue bataille juridique elle perdit son procès.

À ce moment-là, la Port Authority se retrouva entre le marteau et l’enclume : impossible d’effectuer les travaux d’entretien des Tours Jumelles, à cause du coût d’enlèvement de l’amiante, mais impossible également de les démolir, précisément en raison de la grande quantité d’amiante qu’elles contenaient. La seule solution aurait été de démanteler les Tours morceau par morceau, mais le coût d’une telle opération était tout simplement hors de propos.

La bonne fortune a voulu qu’au printemps 2001, un entrepreneur du nom de Larry Silverstein, déjà propriétaire du WTC 7, se soit offert pour reprendre la gestion des Tours Jumelles au travers d’un contrat de location (leasing) de 99 ans.

La valeur des Tours Jumelles sur le marché était alors d’environ 1,2 milliard de dollars, mais Silverstein paya 3,2 milliards de dollars à condition d’entrer immédiatement en possession de ce que lui-même a défini comme « le rêve de sa vie. »

Bien que l’attentat à la bombe de 1993 n’ait finalement détruit que quelques étages à l’intérieur de la Tour Nord, Silverstein fit ajouter dans sa nouvelle police d’assurance le cas de la destruction totale des Tours suite à un attentat terroriste.

On ne sait jamais, aura-t-il pensé, imaginons qu’au lieu d’un seul camion piégé, ils en mettent trois ou quatre, et je risque que tout ça s’écroule.

Ce qui s’est passé ensuite, le 11-Septembre, nous le savons tous.

Le matin du 12 septembre, Silverstein était tellement abattu par la perte de ses deux « joyaux » qu’il racontait à qui voulait bien l’entendre qu’il était certain de pouvoir faire payer aux assurances le double du montant prévu – 7 milliards de dollars au lieu de 3,5 – puisqu’il y avait eu deux attentats terroristes distincts.

À la fin d’une longue bataille juridique, Silverstein a perçu la somme de 4,5 milliards de dollars pour reconstruire les Tours Jumelles, se retrouvant propriétaire de plus de 100 hectares d’un terrain parmi les plus convoités et les plus rentables au monde.

Entre-temps, l’amiante des Tours Jumelles a été respiré par tous les secouristes qui ont travaillé d’arrache-pied pour fouiller et évacuer les décombres de son terrain, et qui aujourd’hui meurent par centaines, fauchés par le mésothéliome ou d’autres maladies respiratoires, dans le silence abject des médias du monde entier.

Massimo Mazzucco