"Le mensonge et la crédulité s'accouplent et engendrent l'Opinion" Paul Valéry

24 février 2009

Secret et sécurité nationale


Examinons de quelle manière l’administration Bush utilisa l’excuse du ‘secret national’ lors de diverses situations, évitant ainsi de rendre publics certains faits. Par exemple, voyons d’abord l’opinion des dirigeants de la commission d’enquête eux-mêmes à ce sujet, tel qu’ici rapporté par le Post-Intelligencer de Seattle, le 15 mai 2004.

« Trop de documents de routine du gouvernement portent la mention ˝secret˝, affirment les leaders de la commission sur le 11 septembre, ce qui empêche les gens du public d’apprendre l’existence de tous les avertissements et informations dont ils pourraient avoir besoin pour se protéger.

Thomas Kean, président de la commission, a déclaré que la plupart des documents secrets qu’il avait observés dans le cadre des investigations sur la tragédie du 11 septembre 2001 étaient constitués de ouï-dire ou d’informations disponibles ailleurs publiquement, et n’étaient pas, par conséquent, de véritables secrets. [...]»

Cette déclaration d’apparence anodine en surface de la part du président de la commission d’enquête sur le 11 septembre recèle pourtant une importance capitale lorsqu’on y réfléchit un brin. Le fait que Thomas Kean déclare ni plus ni moins que des rumeurs et informations entourant les événements du 11 septembre sont tenues secrètes devrait déjà suffire à sonner quelques cloches… Mais voyons la suite du même article.

« ˝Le trois quarts de ce que j’ai lu et qui était classé confidentiel n’aurait pas dû l’être˝, a dit l’ancien gouverneur républicain du New Jersey.[...] Lee Hamilton, vice-président de la commission, a affirmé avoir déjà conclu que le gouvernement devait résoudre ce problème d’usage abusif du sceau du secret.

˝Nous avons un sérieux problème de surclassification˝, a dit Hamilton, un ancien représentant démocrate de l’Indiana au Congrès.[...] Kean se rappelle avoir visionné un document classé confidentiel sous l’oeil attentif d’un agent du FBI assigné à la supervision des membres du comité d’enquête. Après avoir lu le document, Kean dit avoir questionné l’agent du FBI pour savoir pourquoi le document était classé confidentiel, puisqu’il ne contenait aucune information qu’il n’avait apprise en lisant les journaux.

˝Oui, mais vous ne saviez pas que c’était vrai˝, lui avait répondu l’agent. » Pourquoi voudrait-on classer confidentielles certaines informations rapportées par les journaux relatives au 11 septembre, surtout si celles-ci sont véritablement fondées? Il serait probablement par ailleurs étonnant d’apprendre quelle proportion d’informations citées dans cet ouvrage se retrouve affublée du sceau du secret national.Enchaînons avec un article paru plus récemment dans l’USA Today, daté du 15 mars 2007, qui confirme le phénomène.

« Plus d’un million de pages de documents gouvernementaux historiques l’équivalent d’une pile [de papier] plus haute que le Capitole des États-Unis ont été retirées de la vue du public depuis les attentats terroristes de septembre 2001, selon un rapport obtenu par l’Associated Press. Certains des documents datent de plus d’un siècle.

[...]L’administration des archives a commencé à retirer la documentation en novembre 2001 après que le Département de la Justice ait ordonné aux agences d’être plus prudentes en rendant publics les documents gouvernementaux. L’agence a retiré environ 1,1 million de pages, selon des rapports de développement mensuel partiellement édités et examinés par l’AP. Les rapports ont été obtenus par le biais d’une requête sous le libre accès à l’information. [...]Après les attaques du 11 septembre 2001, l’administration des archives a signé un pacte secret avec le Pentagone et la CIA pour permettre aux responsables du service de renseignements de réviser et retirer des dizaines de milliers de pages du domaine public s’ils considèrent que celles-ci ont été rendues publiques trop rapidement. [...]» En d’autres mots, les attaques du 11 septembre servirent notamment de prétexte pour permettre aux responsables des services de renseignements américains de hausser d’un cran la portée de leur autorité en matière de classification de documents.

Cependant, alors que la surclassification de documents est une chose qui mérite d’être surveillée de près, le non-respect du libre-cours d’une enquête publique en est une autre, fort différente. Et, dès les premiers mois d’existence de la commission d’enquête sur les attentats du 11 septembre, l’entrave au bon fonctionnement de celle-ci débuta. Voyons d’abord ce que rapportait le Guardian britannique le 10 juillet 2003.

« Le comité américain chargé d’enquêter sur les attaques terroristes du 11 septembre a accusé hier le Pentagone et le Département de la Justice d’entraver l’enquête et a affirmé que les témoins étaient intimidés.La commission fédérale d’enquête a été nommée par la Maison Blanche il y a huit mois alors que celle-ci se trouvait sous une pression intense de la part du Congrès, qui désirait que les allégations selon lesquelles la CIA, le FBI et le Pentagone auraient pu faire plus pour prévenir les attaques d’Al Qaeda en 2001 soient examinées. [...]L’investigation a été retardée par le retrait de son directeur initial, Henry Kissinger, pour des raisons de conflits d’intérêt, et dû à des difficultés de financement. Le comité biparti affirme maintenant que son travail a été bloqué par la bureaucratie.

Tim Roemer, ancien représentant au Congrès et membre de la commission, a déclaré hier ‘Nous ne recevons pas le type de coopération que nous devrions. Nous avons besoin qu’un flot constant d’informations nous parvienne... Plutôt, nous recevons [l’information] au compte-gouttes.’Dans une déclaration, le comité a affirmé que le manque de coopération de la part du Pentagone était ‘particulièrement sérieux’.

Le directeur de l’enquête, Thomas Kean, a critiqué le Département de la Justice pour son insistance à ce que les responsables des renseignements qui témoignent soient accompagnés par des ‘surveillants’ de leur agence.

‘Je crois que la commission est unanime qu’il s’agit d’intimidation que d’avoir quelqu’un assis derrière vous en permanence, pour qui vous travaillez ou qui travaille pour la même agence que vous’, a-t-il dit. [...]Mais Steven Push, qui a perdu sa femme le 11 septembre et qui représente les familles de victimes, a déclaré ‘Je crois qu’il y a de l’obstruction en cours [dans les procédures].

’Il a ajouté ‘Ça commence à ressembler à une forme de cover-up.’ » Et puisque les familles des victimes sont possiblement les plus susceptibles d’être choquées par le manque de coopération de la part des paliers gouvernementaux avec la commission d’enquête, portons ensuite notre attention sur cet article de l’AP (Associated Press), daté du 13 novembre 2003.

« Des parents de personnes ayant péri dans les attaques du 11 septembre affirment que la commission fédérale a accepté trop de conditions pour parvenir à une entente avec la Maison Blanche sur l’accès à des documents contenant des renseignements secrets.Le ˝Family Steering Committee˝, un groupe formé de membres de familles des victimes qui supervise le travail de la commission indépendante, a critiqué l’entente annoncée tard mercredi. Sous cette entente, seulement certains des dix commissaires seront autorisés à examiner les documents classés confidentiels, et leurs notes seront sujettes à l’inspection de la Maison Blanche.

˝Les dix commissaires devraient avoir libre accès, complet et sans entraves à toute la documentation˝, déclarait le groupe jeudi en appelant à ce que soit rendue publique ˝en entier et par écrit l’entente finale et officielle˝.

Ni les commissaires ni la Maison Blanche n’ont révélé les termes de l’entente, quoique des sources familières avec la commission d’enquête en aient décrit quelques modalités. [...]Le président de la commission, l’ancien gouverneur du New Jersey Thomas Kean, a défendu l’entente.

˝La chose la plus importante pour moi est qu’il n’y aura aucun document qui ne sera pas vu par un membre de la commission, et ces documents seront utilisés pour guider notre rapport˝, a dit Kean.Deux commissaires, un ancien représentant de l’Indiana, Tim Roemer, et l’ancien sénateur de la Georgie, Max Cleland, ont critiqué l’entente après son annonce, déclarant qu’elle posait des restrictions injustifiées au travail de la commission. [...]»

Comment un comité d’investigation peut-il établir un portrait authentique et uniforme des attentats avec cet arrangement selon lequel seulement certains membres ont accès à certains documents? N’est-ce pas là l’équivalent, lors d’un procès pour meurtre, de présenter certaines preuves à certains membres du jury, et certaines autres preuves à différents jurés? Pour quelle raison le gouvernement d’un pays victime d’une attaque terroriste aussi horrible voudrait-il entraver ainsi le travail de ses propres enquêteurs? L’administration américaine ne devrait-elle pas, au contraire, être la première à vouloir faire toute la lumière sur ce dossier dans le but d’exposer les coupables au grand jour?

Observons maintenant cet article du Washington Post paru le 31 janvier 2004, moins de trois mois plus tard.

« La Maison Blanche, déjà aux prises avec un débat public concernant l’échéance de la commission d’enquête indépendante sur les attentats du 11 septembre, refuse de fournir à ce comité des notes sur les documents d’un exposé présidentiel prises par certains de ses propres membres, ont déclaré des responsables cette semaine.L’impasse a incité la commission de dix membres à envisager l’émission de subpoenas pour obtenir ces notes et accentue les relations amères entre l’administration Bush et le panel biparti, selon des sources familières avec le sujet. L’inaccessibilité des documents signifierait que l’information qu’ils contiennent ne pourrait pas être incluse dans le rapport final sur les attaques, ont affirmé plusieurs responsables.

˝Nous avons des discussions sur ce sujet pratiquement à chaque heure, ou au moins à chaque jour˝, a dit le vice-président de la commission, Lee H. Hamilton, un ancien démocrate de l’Indiana, membre du Congrès. ˝Nous défendons tous nos droits pour obtenir l’accès dont nous avons besoin. ... Il s’agit d’un élément prioritaire que nous devons résoudre, et nous travaillons pour le résoudre.

˝Ce désaccord est le plus récent obstacle qu’a rencontré la Commission nationale sur les attentats terroristes contre les États-Unis, pressée par le temps pour compléter son travail avant l’échéance du 27 mai après des mois de lutte pour accéder à des documents du gouvernement. La commission a demandé que l’échéance soit repoussée d’au moins deux mois, mais la Maison Blanche ainsi que des leaders républicains au Congrès s’opposent à l’idée. [...]Le dernier conflit découle d’une entente convenue en novembre permettant à une équipe de quatre membres de la commission d’examiner des documents hautement confidentiels connus sous le nom d’exposés présidentiels quotidiens (PDB), incluant un mémo controversé d’août 2001 qui discutait de la possibilité de détournements d’avions de ligne par des terroristes d’Al Qaeda. L’entente permettait à l’équipe formée de trois membres de la commission et du directeur exécutif Philip D. Zelikow de prendre des notes à partir de ces documents qui pourraient être ensuite fournies au reste de la commission, mais seulement après que la Maison Blanche ait donné son autorisation.L’équipe a complété son travail depuis plusieurs semaines mais a été incapable de parvenir à un accord avec la Maison Blanche sur la façon de partager ses résumés avec les sept membres de la commission qui ne sont pas au courant du contenu des documents, ont dit des responsables.

L’impasse a incité les membres de la commission à discuter de l’émission de subpoenas pour obtenir les résumés ou les fichiers complets des exposés présidentiels quotidiens, ont affirmé plusieurs sources.Un membre démocrate de la commission, Timothy J. Roemer, ancien député du Congrès de l’Indiana, a dit que ˝le procédé labyrinthique et tortueux établi par la Maison Blanche est bloqué. Si ce n’est pas résolu au cours des prochains jours, je crois que nous devrons poursuivre d’autres options.˝ [...]Après des mois de délais l’automne dernier, la commission a émis des subpoenas pour obtenir des documents du Pentagone, de l’Administration Fédérale de l’Aviation et de la ville de New York pour éventuellement parvenir à des ententes dans les trois cas. Le comité avait également menacé la Maison Blanche d’un subpoena à propos des PDB, mais avait accepté un compromis parce que les responsables avaient dit ne pas vouloir s’embourber dans une bataille judiciaire.

La Maison Blanche avait indiqué à ce moment qu’elle considérait déclarer les documents PDB comme étant protégés par le privilège exécutif et qu’ils ne seraient pas matière à révision par des parties externes. » Ainsi, après s’être opposée pendant plus d’un an à la création d’une commission d’enquête, l’administration Bush refusait ensuite d’ouvrir ses livres à celle-ci et de faire preuve de transparence.Poursuivons avec un extrait d’article publié par l’agence de presse Reuters le 26 octobre 2003, traitant précisément de ces obstacles rencontrés à l’automne par la commission.

« Le dirigeant de la commission fédérale enquêtant sur les attaques du 11 septembre 2001 affirme que la Maison Blanche refuse de leur fournir des documents contenant des renseignements hautement confidentiels et qu’il est prêt à émettre un subpoena s’ils ne peuvent pas les obtenir d’ici les prochaines semaines, selon un rapport.

Thomas Kean, président de la commission nationale bipartie sur les attaques terroristes contre les États-Unis, a dit qu’il pensait aussi que la commission serait bientôt forcée d’émettre des subpoenas pour d’autres agences du secteur exécutif, a rapporté le New York Times dans son édition de dimanche. [...]Plus tôt ce mois-ci, la commission a voté pour envoyer un subpoena à l’Administration Fédérale d’Aviation après avoir conclu que l’agence retenait des documents reliés aux attaques.

˝Tout document ayant rapport avec cette investigation ne peut être hors de notre portée˝, a dit Kean, l’ancien gouverneur républicain du New Jersey. [...]» Signalons au passage que le directeur exécutif de la commission d’enquête, Philip Zelikow, entretenait au moment même de l’investigation officielle des liens directs avec la Maison Blanche. Cette nouvelle, qui ne fut révélée publiquement qu’en février 2008, compromet à son tour l’intégrité déjà douteuse du processus d’investigation. Rappelons que Zelikow, à titre de directeur exécutif, figurait parmi les quatre seules personnes ayant accès aux documents confidentiels lors de l’enquête.Voici d’ailleurs un extrait d’article publié par CNN le 3 février 2008.

« Le directeur exécutif de la commission sur le 11 septembre avait des liens plus étroits avec la Maison Blanche que ce qui a été divulgué précédemment et a tenté d’influencer le rapport final d’une manière telle que le personnel [de la commission] percevait fréquemment comme limitant la responsabilité de l’administration Bush, révèle un nouveau livre.Philip Zelikow, un ami de la conseillère à la sécurité nationale de l’époque, Condoleezza Rice, a discuté avec elle à plusieurs reprises durant l’investigation de vingt mois, qui a [entre autres] examiné son rôle de près dans l’évaluation de la menace d’Al Qaeda.

Il a également échangé de fréquents appels avec la Maison Blanche, dont au moins quatre provenant de Karl Rove, le conseiller politique en chef de Bush à l’époque.

À une occasion, le directeur exécutif de la commission a tenté de pousser la formulation d’un rapport préliminaire suggérant un lien plus important entre le chef d’Al Qaeda, Oussama Ben Laden, et l’Irak, ce qui concordait avec les prétentions de la Maison Blanche, mais pas avec le point de vue du personnel de la commission, selon ‘La Commission : L’histoire non-censurée de l’enquête sur le 11 septembre’ de Philip Shenon.Shenon, journaliste au New York Times, affirme que Zelikow a tenté d’intimider le personnel [de la commission] pour éviter des découvertes dommageables pour le président Bush qui cherchait à ce moment à se faire ré-élire et pour Rice. [...]Contacté par l’AP [Associated Press], Zelikow a présenté une déclaration de 131 pages incluant l’information qu’il affirme avoir fournie pour le livre. Dans celle-ci, Zelikow reconnaît avoir discuté avec Rove et Rice pendant le travail de la commission malgré son engagement général à ne pas le faire. Mais il affirme que les conversations n’ont jamais traité de politique.

La Maison Blanche n’avait pas de commentaires dans l’immédiat, dimanche. [...]Le livre semble soulever de nouvelles questions concernant l’indépendance de la commission bipartie, qui fut créée en 2002 pour enquêter sur les faux-pas du gouvernement qui ont mené aux attaques du 11 septembre. [...]» Ainsi, le directeur exécutif de la commission d’enquête reconnaît avoir eu plusieurs conversations avec la Maison Blanche pendant l’investigation. Mais bien entendu, jamais le sujet du 11 septembre ou de l’enquête elle-même n’aurait été abordé...

À ce propos, examinons de quelle manière John Lehman, commissaire sur la commission, tentait d’atténuer les apparences de conflit d’intérêt entre Philip Zelikow et la Maison Blanche. L’extrait suivant est tiré d’une entrevue téléphonique avec Lehman, diffusée le 3 février 2008 dans le cadre de l’émission NewsLive de MSNBC.

« [...] ‘Nous avions intentionnellement assemblé un personnel basé sur des gens qui avaient, en un sens, des conflits d’intérêts. Plusieurs d’entre eux avaient travaillé pour l’administration Clinton à des postes assez élevés; d’autres ont servi sous l’administration Bush. Nous avions besoin de ces personnes pour nous frayer un chemin à travers le marasme et l’importante quantité d’informations. Alors tout le personnel présentait jusqu’à un certain point un conflit d’intérêts, mais nous étions confiants que Philip [Zelikow] et nous sommes au courant du moindre détail contenu dans le livre de Shenon nous étions confiants qu’il était un académicien très indépendant et qu’il pouvait maintenir son indépendance. [...]’ » En termes plus simples, inutile de s’en faire avec les apparences de conflits d’intérêts entre Philip Zelikow et la Maison Blanche puisque chacun des membres de la commission d’enquête possédait également ses propres conflits d’intérêts. Très rassurant.Et, question de se rassurer un peu plus, ajoutons que plus du quart des informations contenues dans le rapport de la commission sur le 11 septembre fut obtenu par le biais d’interrogations controversées par la CIA de présumés membres d’Al Qaeda.

Il est important de savoir que lors de ces séances, la CIA utilisa des ‘techniques interrogatoires rehaussées’, expression signifiant que les individus interrogés furent assujettis à des abus mental et physique, qu’ils furent exposés à des chaleurs et à des froids extrêmes, qu’ils furent privés de sommeil et/ou qu’ils furent soumis à des simulations de noyade jusqu’à ce que les interrogateurs les aient considérés coopératifs. En d’autres mots, ils furent torturés. Pourtant, tel que le suggère la logique, un prisonnier maltraité risque fort d’avouer n’importe quoi pour mettre un terme à un supplice prolongé. Observons cet extrait d’article paru sur NBC News le 30 janvier 2008.

« La commission sur le 11 septembre soupçonnait que l’information critique qu’elle a utilisée dans son rapport historique était le fruit de rudes interrogatoires de membres d’Al Qaeda des interrogatoires que plusieurs critiques caractérisent comme étant de la torture. Pourtant, le personnel de la commission n’a jamais questionné l’agence sur ses techniques d’interrogation et a même ordonné une deuxième ronde d’interrogations pour poser de nouvelles questions plus spécifiques aux mêmes détenus, a appris NBC News. [...]L’analyse démontre qu’une importante portion de ce qui fut rapporté [dans le rapport de la commission] à propos de la planification et de l’exécution des attaques terroristes contre New York et Washington provenait des interrogations de membres importants d’Al Qaeda. Chacun d’entre eux avait été sujet aux ‘techniques interrogatoires rehaussées’. Certains ont même été soumis au ‘waterboarding’, la plus controversée des techniques lors de laquelle la noyade est simulée.

L’analyse de NBC News révèle que plus du quart de toutes les notes en bas de page dans le rapport sur le 11 septembre réfèrent à des interrogations par la CIA de membres d’Al Qaeda qui furent assujettis aux techniques interrogatoires maintenant controversées. En fait, l’information dérivée de ces séances d’interrogation se retrouve au coeur des chapitres les plus cruciaux du rapport, ceux qui portent sur la planification et l’exécution des attaques. [...]Au moins quatre des membres [d’Al Qaeda] dont les interrogatoires figurent dans le rapport de la commission ont déclaré qu’ils avaient fourni à leurs interrogateurs des informations capitales afin de mettre un terme à leur ‘torture’. [...]Selon des responsables haut placés des services de renseignements américains, toujours actifs ou retraités, les agents [d’Al Qaeda] cités par la commission furent soumis aux méthodes les plus rudes de la CIA, les ‘techniques d’interrogation rehaussées’. Ces techniques incluent l’abus physique et mental, l’exposition à des chaleurs et à des froids extrêmes, la privation de sommeil ainsi que la simulation de noyade. [...]Un ancien responsable haut placé des services de renseignements américains affirme que la commission n’a jamais exprimé d’inquiétudes à propos des techniques [d’interrogation] et a même exigé la nouvelle série [d’interrogations].

‘Souvenons-nous’, a dit le responsable aux renseignements, ‘La commission avait accès aux rapports de renseignements qui provenaient des interrogations. Cela ne les satisfaisait pas. Ils ont exigé un accès personnel direct aux détenus et l’administration [Bush] leur a tout simplement refusé.’

[...]Le personnel de la commission interviewé par NBC News ne contredit pas l’affirmation du responsable selon laquelle ils n’ont posé aucune question sur les techniques d’interrogation. [...]La première requête de la commission pour avoir accès aux détenus est venue tôt en 2004, environ au même moment que le scandale d’Abu Ghraib faisait surface. Dans ce scandale, les interrogateurs militaires de la prison la plus célèbre de Bagdad étaient accusés de torturer des prisonniers de basse sécurité. [...][Michael Ratner, président du Centre des Droits constitutionnels] soutient que ‘si [la commission] soupçonnait qu’il pouvait y avoir de la torture, ils auraient dû réaliser que selon la loi, les informations obtenues sous la torture ne sont pas fiables, en partie à cause de la possibilité d’une fausse confession... au strict minimum, ils auraient dû ajouter une mise en garde à toutes ces références.

’ [...]Quatorze des détenus les plus importants ont eu leur audience préliminaire ce printemps devant le Tribunal de Révision du Statut des Combattants au Pentagone. [...]Quatre d’entre eux ont affirmé avoir fourni des informations simplement pour faire cesser la torture. Quoique les détails ont été édités dans toutes les dépositions des détenus, le tribunal a permis dans un cas l’inclusion d’une lettre écrite par le père d’un des détenus, qui décrit ce qu’il affirme être la torture de son fils par les américains.

Dans cette lettre incluse dans le registre, Ali Khan prétend que son fils, Majid, a subi une torture prolongée avant ainsi qu’après les séances d’interrogation.‘Les américains le torturaient à coups de huit heures à la fois, l’attachant solidement à une petite chaise dans des positions désagréables jusqu’à ce que ses mains, ses pieds et son esprit s’engourdissent.

’ [...]‘Quand il n’était pas interrogé, les américains plaçaient Majid dans une petite cellule sans aucune lumière, trop étroite pour qu’il puisse s’étendre ou s’asseoir avec les jambes étirées. Il devait se tapir. L’endroit grouillait aussi de moustiques. Cette torture n’a pris fin que lorsque Majid a accepté de signer une déclaration qu’il ne fut même pas autorisé à lire. Mais [la torture] a ensuite repris lorsque Majid fut incapable d’identifier certaines rues et certains quartiers de Karachi [Pakistan] qui lui étaient inconnus.’ [...]Ironiquement, deux anciens membres de la commission ont noté que le rapport final de la commission recommande essentiellement que les États-Unis encouragent de mettre fin à la torture. [...]» Ainsi donc, selon la loi, les informations obtenues sous la torture ne sont pas fiables, mais plus du quart du rapport officiel est pourtant constitué de celles-ci, et ce au cœur même des chapitres les plus importants.

Voilà qui permet à nouveau d’évaluer la crédibilité de la commission d’enquête sur le 11 septembre. Non seulement ce rapport fut-il élaboré en se basant sur des informations obtenues suite à la torture de prisonniers, mais nous apprenons également que même si les membres de cette commission soupçonnaient que les techniques d’interrogations des détenus ne suivaient pas les règles conventionnelles, jamais ils ne posèrent de questions à ce sujet.

La question reste donc à savoir si la simulation de noyade, l’exposition à des températures extrêmes et autres sévices représentent effectivement de la torture. Pour répondre à cette question, qui de mieux placée que la Haute Commissaire des Droits Humains aux Nations Unies?

L’extrait suivant est tiré de l’agence de presse Reuters, 8 février 2008.« La technique d’interrogation controversée connue sous le nom de ‘waterboarding’ et utilisée par les États-Unis représente de la torture, a déclaré vendredi la directrice des Droits Humains aux Nations Unies.

‘Je n’aurais aucun problème à dire que cette pratique tombe sous l’interdiction de la torture’, a affirmé Louise Arbour, Haute Commissaire des Droits Humains aux Nations Unies, lors d’une conférence de presse à Mexico City. [...]» La version officielle des attentats du 11 septembre ne pouvait-elle donc pas être corroborée autrement qu’en torturant les détenus?

Prenons maintenant un instant pour s’intéresser de plus près au point de vue de personnes impliquées de manière plus émotive que politique dans toute cette affaire. À l’été 2003, un premier groupe de familles de victimes sonnait l’alarme, comme le rapporte cet article de CBS News paru le 24 juillet 2003.

« Elles sont connues sous le nom de ˝Jersey Girls˝ des veuves ayant perdu leur mari le 11 septembre et s’étant trouvé une mission. [...]Après les attaques, elles ont combattu férocement pour une investigation indépendante, se rendant à Washington de façon régulière. Elles désiraient savoir pourquoi autant d’agences gouvernementales avaient échoué à prévenir les actes terroristes du 11 septembre.

˝Deux ans plus tard, il semble encore y avoir un voile de secret˝, a-t-elle dit [Kristen Breitweiser]. Jeudi, elles étaient de retour sur la colline du Capitole pour exprimer en personne leur insatisfaction sur le rapport du Congrès sur les attaques contre les États-Unis. ˝Au mieux, le rapport est incomplet˝, a dit Breitweiser. ˝Quinze des dix-neuf terroristes étaient saoudiens. Nous avons des pistes financières claires et convaincantes qui lient les princes saoudiens aux terroristes. Pourquoi ceci ne se retrouve pas dans le rapport, je ne sais pas.

˝Patti Casazza affirme savoir pourquoi.˝Les intérêts géopolitiques. L’Arabie Saoudite fournit une grande quantité de pétrole.

˝Lorsqu’on lui a demandé si l’administration Bush retenait des informations, Casazza a répliqué ˝Ils noircissent des sections dans le rapport. Ils retiennent des informations.˝ [...]» Cette même Patti Casazza allait d’ailleurs beaucoup plus loin en 2007 lors de son allocution dans le cadre d’une conférence visant à exposer les faits et anomalies entourant les attentats. Expliquant qu’elle avait eu la chance de communiquer avec certains initiés qui disposaient d’informations privilégiées sur les événements du 11 septembre, elle déclarait ceci.

« [...] Ils possédaient des informations. Dit simplement, le gouvernement savait non seulement le moment précis, mais il connaissait aussi la date et la méthode selon laquelle les attaques devaient se dérouler. Et rien de tout cela n’est parvenu dans les grands médias. Rien de tout cela n’a paru dans la Commission. Et pourtant, le jour où le rapport de la Commission a été publié, tous vos représentants [au Congrès] étaient à leurs postes et disaient ‘Quel travail fantastique cette Commission a-t-elle accompli. Un véritable service à la nation.’ Et c’était tout sauf un service. C’était une fabrication de toutes pièces. [...]» Jetons ensuite un coup d’oeil sur un extrait d’entrevue qu’a donnée Robert McIlvaine à la télévision italienne dans le cadre de l’émission Maurizio Costanzo Show le 23 octobre 2007. M. Mc Ilvaine perdit son fils le 11 septembre 2001 et questionne depuis ce temps la version officielle sur les attentats.

« [...] J’ai passé chaque jour de ma vie depuis 2001 à tenter de découvrir qui était responsable de la mort de mon fils. J’y ai travaillé indépendamment, je me suis présenté à toutes les audiences de la commission sur le 11 septembre. Selon Richard Ben-Veniste, un membre de la commission, le but de cette commission n’était pas d’investiguer. Il a indiqué que ce n’était qu’une simple exposition. Imaginez ensuite que quelqu’un vous dise ceci alors que votre enfant a été tué : ‘Je suis désolé, nous ne pouvons pas mener une enquête. Nous ne pouvons qu’étaler des faits sur une table et vous prendrez une décision.’ [...] Lors des audiences de la commission, les membres des familles [de victimes] ont posé des centaines, des centaines de questions qui me tenaient également à coeur, et la commission a refusé d’y répondre. Le rapport de la commission sur le 11 septembre est un livre de fiction [applaudissements]. [...]» Que doit-on penser du fait que le père d’une victime du 11 septembre doive se rendre jusqu’en Italie pour qu’une chaîne de télévision accepte de lui consacrer du temps d’antenne?

Citons ensuite l’exemple de Donna Marsh O’Connor, qui perdit sa fille âgée de 29 ans le 11 septembre 2001. Celle-ci travaillait dans la tour Sud du World Trade Center et était enceinte de cinq mois au moment des attentats. Voyons ce que sa mère avait à dire lors d’une conférence de presse diffusée sur le réseau parlementaire C-SPAN, une chaîne de télévision publique à but non lucratif.

« Je n’ai pas revu ma fille depuis cinq ans, si l’on fait exception du fait qu’elle est tout le temps présente dans mon esprit, et le gouvernement actuel a fait de moi une victime des théories de complot parce qu’il n’a pas répondu entièrement ou permis à qui que ce soit de poser les véritables questions sur le 11 septembre. C’est ce que je vous demande [aux journalistes] aujourd’hui: du temps d’antenne.

Nous ne sommes pas fous : nous avons des questions, nous exigeons des réponses. [...] Nous pouvons créer un environnement plus sécuritaire pour nous-mêmes en refusant de continuer à cacher la vérité. [...] Nous demandons une nouvelle investigation sur les événements du 11 septembre, et cette fois, qu’elle soit réellement bi-partisane et mondiale, et qu’elle inclue les familles [des victimes] du début à la fin. [...]» Puisqu’il est question des familles de victimes, signalons qu’à la suite de la tragédie, le gouvernement américain leur offrait un impressionnant montant de compensation en retour d’un engagement de leur part à ne déposer aucune poursuite dans cette affaire. Voici un court extrait d’article de CNN paru le 26 avril 2006.

« Les procureurs ont demandé à un juge de revoir sa décision de permettre aux familles [de victimes] du 11 septembre qui poursuivent les compagnies aériennes d’avoir accès à de la documentation assemblée dans le dossier criminel contre le terroriste d’Al Qaeda, Zacarias Moussaoui. [...]Les [65] poursuivants ont poursuivi en 2002 les compagnies d’aviation pour négligence ayant causé la mort, plutôt que d’accepter la compensation d’un fonds fédéral qui avait alloué sept milliards de dollars aux familles. Brinkema a donné raison à leurs avocats, à savoir que la loi sur laquelle reposait le fonds de compensation aux victimes protégeait les droits des familles non participantes de déposer une poursuite pour négligence. [...]» Un calcul rapide permet de déduire que le fonds de sept milliards de dollars, réparti en plus ou moins 2900 familles, représentait une somme d’environ 2,4 millions de dollars par famille de victime. Difficile à refuser, n’est-ce pas?

Mais revenons à nos moutons. Près de deux ans après la publication du rapport final de la commission, l’histoire qui nous occupe prenait une tournure à tout le moins étrange. Voici à ce propos un extrait d’article paru dans le Washington Post du 2 août 2006.« Certains membres du personnel et commissaires du comité sur le 11 septembre ont conclu que l’histoire initiale du Pentagone sur la façon qu’ils ont réagi aux attaques terroristes de 2001 pourrait avoir fait partie d’un effort délibéré pour tromper la commission et le public, plutôt qu’un reflet de la confusion des événements cette journée-là, rapportent des sources impliquées dans le débat.

Les soupçons de méfaits étaient si présents que la commission de dix membres, lors d’une rencontre secrète à la fin de son mandat à l’été 2004, a débattu de référer le dossier au Département de la Justice pour une investigation criminelle, selon plusieurs sources à la commission. Des membres du personnel et certains commissaires croyaient que des courriels et d’autres documents fournissaient une cause suffisante pour croire que des responsables militaires et de l’aviation avaient violé la loi en faisant de fausses déclarations au Congrès ainsi qu’à la commission, espérant dissimuler la réaction bousillée aux attentats, disent des responsables.Finalement, le comité a accepté un compromis en remettant les allégations aux inspecteurs généraux des départements de la Défense et des Transports, qui peuvent exiger une enquête criminelle s’ils la croient justifiée, ont dit des responsables.

˝À ce jour, nous ne savons pas pourquoi NORAD (Commandement Aérospatial Nord-Américain) nous ont dit ce qu’ils nous ont dit˝, affirme Thomas H. Kean, l’ancien gouverneur républicain du New Jersey qui dirigeait la commission. ˝C’était tout simplement si loin de la réalité. ... Il s’agit de l’une des questions qui sont demeurées sans réponses.

˝Quoique le rapport de la commission indique clairement que les premières versions du Département de la Défense sur les événements de la journée des attaques étaient erronées, la révélation qu’elle a considéré de demander une enquête criminelle montre avec quel scepticisme ces rapports étaient reçus par la commission et fournit un aperçu de la tension entre celle-ci et l’administration Bush. [...]Pendant plus de deux ans après les attaques, des responsables de NORAD et de la FAA [Administration Fédérale d’Aviation] ont fourni des informations inexactes sur leur réponse aux détournements des avions, en témoignages ainsi que dans les apparitions devant les médias. Les autorités avaient laissé entendre que la défense aérienne américaine avait réagi rapidement, que des avions chasseurs avaient été déployés pour répondre aux deux derniers détournements et qu’ils étaient prêts à descendre le vol United Airlines 93 s’il venait à menacer Washington.

En fait, la commission rapportait un an plus tard que des enregistrements audio du centre de commandement Nord-Est de NORAD et d’autres documents démontrent clairement que les militaires n’ont jamais eu aucun des avions de ligne détournés en vue et qu’ils ont à un certain moment poursuivi un avion fantôme le vol American Airlines 11 longtemps après qu’il se soit écrasé sur le World Trade Center.

Le Major Général Larry Arnold et le Colonel Alan Scott ont déclaré à la commission que NORAD avait d’abord repéré le vol United 93 à 9h16, mais la commission a déterminé que l’avion ne fut détourné que douze minutes plus tard. Les militaires n’ont pas eu connaissance de ce vol jusqu’à après son écrasement en Pennsylvanie.

Ces divergences, ainsi que d’autres, n’ont été éclaircies que lorsque la commission, forcée à utiliser des subpoenas, a obtenu des enregistrements de la FAA et de NORAD, ont affirmé des responsables. La réticence des agences à fournir les enregistrements – jumelée à des courriels, à des déclarations publiques erronées ainsi que d’autres éléments – ont poussé certains membres du comité à croire que les autorités ont cherché à tromper la commission et le public sur ce qui s’est produit le 11 septembre.

˝J’étais renversé de voir à quel point la vérité était différente de la manière dont elle avait été décrite˝, a dit John Farmer, ancien ministre de la Justice du New Jersey qui dirigea l’enquête du personnel sur les événements du 11 septembre, dans une entrevue récente. ˝Les enregistrements ont révélé une histoire radicalement différente de ce qui nous avait été dit à nous ainsi qu’au public pendant deux ans. ... Ce n’est pas de la manipulation d’informations. Ce n’est pas vrai.˝ [...]»

Tout ceci vient assurément embrouiller l’histoire un peu plus. Mais que ce soit avant ou après la remise du rapport final de la commission d’enquête, de la désinformation s’est produite quelque part.Et une chose demeure certaine : la lenteur de la réaction américaine à protéger leur espace aérien le 11 septembre est indéniable. Comment se fait-il donc que personne ne fut congédié suite à cette incompétence mortelle? Et surtout, pour quelle raison plusieurs individus occupant des postes stratégiques dans la chaîne de commandement furent-ils au contraire promus?

Nous reviendrons plus en détails sur cet aspect. Mais devrait-on vraiment croire que le système militaire de défense aérienne des États-Unis, le plus sophistiqué de la planète, ne fut en mesure de rejoindre aucun des quatre avions commerciaux avant qu’ils ne s’écrasent?

Rappelons une fois de plus que de septembre 2000 à juin 2001, NORAD avait déployé avec succès ses avions chasseurs à 67 reprises, comme l’indiquait l’AP (Associated Press). Pourtant, le 11 septembre, ce même système de défense échouait à quatre reprises en-deça de deux heures, résultant en près de 3000 morts, ce qui fut suivi de fausses déclarations, de promotions et d’aucun congédiement.

L’exemple des déclarations ˝inexactes˝ du Major Général Larry Arnold et du Colonel Alan Scott nous ramène à un article de l’Associated Press mentionné plus tôt, dans lequel il est rapporté deux jours seulement après les attaques ˝qu’un chasseur F-16 est demeuré en poursuite à courte distance avec un autre avion de ligne commercial sous le joug des terroristes jusqu’à ce qu’il ne s’écrase en Pennsylvanie, selon l’employé.

˝L’information provenait du centre régional de contrôle aérien de Nashua, au New Hampshire, et concordait avec les déclarations initiales d’Arnold et de Scott, qui avaient d’abord affirmé que le vol 93 avait été repéré à 9h16. Cette déclaration était également soutenue par les affirmations de témoins visuels, ces civils qui prétendaient avoir aperçu un avion non identifié et des flammes dans le ciel, au-dessus du comté de Somerset, au moment de l’écrasement. Ajoutons que lors de leurs témoignages devant la commission d’enquête environ deux ans plus tard, lors desquels ils contredirent leurs déclarations initiales, ni le Major Général Larry Arnold, ni le Colonel Alan Scott ne furent placés sous serment, pas plus qu’aucun autre militaire d’ailleurs.

Mais pourquoi ne pas placer sous serment ces individus qui détenaient des postes-clés dans la chaîne de commandement militaire? Le sujet de l’investigation n’était-il pas suffisamment sérieux? La défaillance du système de défense ne justifiait-elle pas à elle seule des interrogatoires serrés, en bonne et due forme? Examinons ensuite cet article très révélateur paru par CNN le 29 janvier 2002, impliquant cette fois-ci le président George W. Bush directement.
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« Le président Bush a personnellement demandé mardi à Tom Daschle, leader de la majorité au Sénat, de limiter les investigations du Congrès sur les événements du 11 septembre, ont appris à CNN des sources du Congrès et de la Maison Blanche. La requête fut émise lors d’une rencontre privée avec les leaders du Congrès, mardi matin. Les sources affirment que Bush a entrepris la conversation.
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Il a demandé que seuls les comités de renseignements de la Chambre et du Sénat examinent les erreurs potentielles de certaines agences fédérales qui auraient pu permettre aux attaques terroristes de survenir, plutôt que de mener une enquête plus large tel que certains législateurs l’ont proposé, selon les sources. La discussion de mardi suivait un rare appel du vice-président Dick Cheney à Daschle, vendredi dernier, lors duquel la même requête lui était faite.

˝Le vice-président a exprimé l’inquiétude qu’une révision de ce qui s’est produit le 11 septembre détournerait les ressources et le personnel de leur effort dans la guerre contre le terrorisme˝, a expliqué Daschle aux journalistes. [...]»

Voilà une manière diplomatique fort peu subtile d’expliquer que l’administration américaine s’opposait à des investigations en profondeur. Avec le recul, on peut se demander comment une telle justification put être fournie sans soulever l’ire du peuple. Après tout, il apparaît absurde qu’une superpuissance comme les États-Unis ne dispose pas de ressources suffisantes pour à la fois investiguer en profondeur sur les pires attaques terroristes de son histoire et assurer convenablement sa propre défense.Le processus logique devant faire suite à un événement de l’ampleur du 11 septembre serait-il si peu évident? Investigation en profondeur, puis réaction appropriée. Comment le système américain put-il laisser le pays partir en guerre avant même qu’une enquête digne de ce nom ne soit menée? Et quelle est donc la raison pour laquelle ce gouvernement désira ensuite limiter la portée des investigations?

Un autre élément, tout aussi important qu’incontournable, fut la réaction initiale du président George W. Bush lorsqu’il fut informé que son pays était sous attaque. Grâce au documentaire de Michael Moore, Fahrenheit 911, des millions de personnes ont pu être témoins de la réaction du président. En fait, il serait plus approprié de parler de son manque de réaction. Pour ceux qui n’auraient pas vu ces images, rappelons que le président Bush se trouvait à l’école primaire Emma E. Booker de Sarasota, en Floride, au matin du 11 septembre, dans le cadre d’une visite préalablement annoncée publiquement. Il devait y rencontrer des jeunes élèves et profiter de l’occasion pour s’adonner à une séance de photos devant la presse.

Avant d’arriver à l’école, le président avait d’abord été informé que le premier avion avait percuté la tour Nord du World Trade Center. C’est toutefois alors qu’il se trouvait en présence des enfants qu’Andrew Card, son chef d’État-Major à l’époque, lui murmura à l’oreille qu’un deuxième avion venait de s’encastrer dans le World Trade Center et que les États-Unis étaient sous attaque. Puis, pendant au moins huit longues minutes, le président demeura immobile, les enfants récitant en choeur un livre intitulé ˝The Pet Goat˝.

Tandis que l’Amérique était ostensiblement en proie à une attaque, où se trouvaient donc les services secrets et les gardes du corps assignés à la protection du président? Puisque la présence de Bush avait été annoncée publiquement, celui-ci ne devenait-il pas aussitôt une cible de prédilection pour les terroristes? La sécurité des enfants, par conséquent, se trouvait en péril par la seule présence du président parmi eux. Ainsi, à moins que les services secrets n’aient été absolument persuadés que le président ne courrait aucun risque, quelle raison valable pouvait-il y avoir de poursuivre la séance de photos avec ces enfants pendant huit longues minutes? De plus, le président se trouvait toujours dans cette école à 9h30 puisqu’il y adressait quelques mots aux journalistes dans une salle modifiée pour y accueillir la conférence de presse.

Alors que certains déduisent que les services secrets savaient pertinemment que le président n’était pas en danger à cet endroit et à ce moment précis, d’autres préfèrent croire toutes autres explications, allant de l’incompétence des services secrets à la démonstration de sang-froid de la part du président Bush. Il est toutefois intéressant, à ce propos, de lire cet extrait du Washington Times daté du 7 octobre 2002.

« ˝Un deuxième avion a frappé la deuxième tour. L’Amérique est sous attaque.

˝Le Chef d’État-Major de la Maison Blanche s’était penché pour murmurer ces mots à l’oreille droite du président à 9h07 le 11 septembre.

˝Je l’ai regardé et c’est tout ce qu’il a dit˝, s’est souvenu M. Bush quelques mois plus tard, lors d’une série d’entrevues en profondeur pour le Washington Times dans le bureau oval et à bord de l’Air Force One.

˝Ensuite il est parti. Il n’y avait pas de temps pour discuter ou quoi que ce soit.˝ [...]Alors que les enfants poursuivaient leur histoire [The Pet Goat], le président fixait encore le vide, perdu dans un tumulte de pensées pressantes. Le premier avion qui s’était écrasé n’était donc pas un accident. Le deuxième avion venait de prouver cela. [...]Le président remarqua quelqu’un qui gesticulait à l’arrière de la salle. C’était Ari Fleischer, attaché de presse de la Maison Blanche, qui tentait d’attirer son attention sans alerter la presse. M. Fleischer exhibait un bloc de papier.De grosses lettres carrées étaient gribouillées à l’endos sur la surface cartonnée: NE DITES RIEN POUR L’INSTANT. Les remarques écrites précédemment sur le brouillon allaient s’avérer malheureusement inappropriées. [...]»

N’est-il pas intéressant d’apprendre que le manque de réaction du président était en réalité justifié par ce que lui dictait son entourage professionnel immédiat? Ainsi, tout était donc sous contrôle pendant ces huit minutes où le président était demeuré immobile. Loin de vouloir éloigner le président Bush des étudiants pour la sécurité de tous, la consigne était plutôt de continuer à jouer le jeu de la séance médiatique devant les enfants, comme si rien d’anormal ne s’était produit.Examinons ensuite un nouvel élément relatif au président américain.

À diverses reprises, celui-ci fut questionné par les médias à propos de sa réaction initiale au matin du 11 septembre. Voici l’une de ses réponses, rapportée par CNN alors que Bush se trouvait au Centre des Congrès d’Orlando, en Floride, le 4 décembre 2001. Pour mieux se situer dans le contexte, le président recevait alors une question d‘un élève de troisième année du primaire.«

[...] QUESTION: Comment vous êtes-vous senti quand vous avez appris pour l’attaque terroriste?

BUSH: Merci, Jordan... Bien, tu ne croiras pas dans quel état j’étais lorsque j’ai appris à propos de l’attaque terroriste.

J’étais en Floride. Et mon Chef d’État-Major, Andy Card en fait, je me trouvais dans une classe pour discuter d’un programme de lecture qui fonctionne. Et j’étais assis à l’extérieur de la classe en attendant d’y entrer, et j’ai vu un avion frapper la tour la télévision était manifestement allumée, et j’ai déjà été pilote moi-même, et j’ai dit ˝voilà un terrible pilote˝, et j’ai dit ˝ce doit être un accident horrible˝.Mais on m’a rapidement sorti de là – je n’ai pas eu beaucoup de temps pour y penser, et alors que j’étais assis dans la classe, Andy Card, mon chef qui était assis tout près est entré et m’a dit ˝Un deuxième avion a frappé la tour. L’Amérique est attaquée.˝ [...]»

Un simple détail, M. le Président : aucune image du premier avion percutant la tour Nord, la première à être touchée, ne fut diffusée à la télévision le 11 septembre. Ces images furent toutes diffusées par la suite, ayant été captées par hasard par des civils.Le président disposait-il alors d’images inaccessibles au reste du monde à ce moment? Ou a-t-il tout simplement de sérieux problèmes de mémoire? Bush répétait pourtant exactement la même histoire un mois plus tard à l’autre bout du pays, lors d’une conférence dans le cadre d’un forum sur l’économie en Californie. L’extrait suivant provient directement du site officiel de la Maison Blanche et fut publié le 5 janvier 2002.« [...] Question: Quelle est la première chose qui vous a passé par la tête quand vous avez appris qu’un avion s’était écrasé dans le premier édifice?

Le président: Oui. Bien, j’étais assis dans une classe de Floride. J’étais descendu pour dire à mon petit frère quoi faire, et je blague, Jeb. Et c’est la mère en moi. De toute manière, j’étais en train d’apprendre à propos d’un programme de lecture qui fonctionne bien. [...]De toute façon, j’étais assis là, et mon Chef d’État-Major bien tout d’abord, quand nous sommes entrés dans la classe, j’avais déjà vu cet avion percuter le premier édifice. Une télévision était allumée. Et vous savez, j’ai pensé que c’était une erreur de pilotage et j’étais étonné qu’une personne puisse faire une si terrible erreur. Et quelque chose n’était pas normal avec l’avion, ou – de toute façon, je suis assis là, j’écoute l’exposé, et Andy Card est venu et m’a dit ˝l’Amérique est sous attaque˝. [...]»

Chose certaine, le président ne semble certes pas avoir de difficultés à se rappeler de cette version des faits. Alors que pratiquement chaque personne en Amérique, et probablement dans le monde, se souvient où elle se trouvait et de quelle manière elle prit connaissance des attaques du 11 septembre, comment le président lui-même peut-il en conserver un souvenir aussi inexact?

Voyons finalement ce que rapportait ABC News lors de sa couverture télévisée des événements, en direct le 11 septembre. Les propos suivants sont ceux du correspondant John Cochran, discutant avec le présentateur Peter Jennings.« Cochran : [...] Peter, comme vous le savez, le président se trouve en Floride pour discuter d’éducation. Il est sorti de sa suite d’hôtel ce matin, il était sur le point de quitter lorsque les journalistes ont vu le Chef d’État-Major de la Maison Blanche, Andy Card, murmurer à son oreille. Les journalistes ont ensuite demandé au président ‘Êtes-vous au courant de ce qui est arrivé à New York?’. Il a dit que oui et qu’il aurait quelque chose à dire à ce sujet un peu plus tard. [...]»

Le président affirmait pourtant à deux reprises avoir pris connaissance des attaques une fois rendu à l’école primaire seulement.Et s’il ne s’agissait pas d’un problème de mémoire?

Egger Ph.