"Le mensonge et la crédulité s'accouplent et engendrent l'Opinion" Paul Valéry

3 avril 2003

Une étude démontre que Saddam Hussein soutenait activement le terrorisme mais pas Ben Laden

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Une étude commandée par le Pentagone et portant sur plus de 600 000 documents retrouvés en Irak après l’invasion américaine en mars 2003 montre qu’il n’existait pas de lien direct entre le dictateur déchu Saddam Hussein et le chef du réseau terroriste Al-Qaïda.L’administration Bush avait utilisé les liaisons dangereuses supposées entre le leader irakien et Ben Laden comme un argument de poids pour lancer la deuxième guerre du Golfe. Déjà à l’époque les services secrets américains avaient exprimé leurs doutes sur une quelconque liaison entre Saddam et Al-Qaïda. Cette nouvelle étude menée par le Iraki Perspectives Project (IPP) a été sponsorisée par un organisme affilié au département de la défense américain.
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Cette étude met néanmoins en avant le soutien par le régime de Saddam Hussein du terrorisme régional et international. Même s’ils ne partageaient pas les mêmes objectifs à long terme de nombreux groupes terroristes avaient avec Saddam un ennemi commun : les Etats-Unis. A certains moments, ces organisations ont coopéré et fait des échanges de bons procédés. Dans la période précédant la première guerre du Golfe, le régime de Saddam Hussein soutenait de nombreuses causes pan-arabiques. La relation entre Saddam et le socialisme arabe à l’origine du mouvement Ba’ath était alors reconnue.
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Mais les relations entre l’Irak et les groupes islamiques radicaux sont bien plus complexes. L’étude de l’IPP affirme qu’il n’y avait pas de connexion directe entre l’Irak de Saddam et Al-Qaïda. Saddam répartissait son soutien entre de nombreux groupes révolutionnaires, nationalistes et terroristes. Mais son régime reconnaissait le danger potentiel que représentait une relation de long terme avec les islamistes radicaux, même si dans certains cas les bénéfices d’une telle liaison ont pu compenser les risques pour Saddam.
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Les documents retrouvés en Irak après l’arrivée des Américains montrent que le régime irakien était impliqué dans des opérations terroristes régionales et internationales avant le lancement de l’Opération IRAQI FREEDOM en 2003. Ses cibles principales étaient ses propres citoyens à l’intérieur comme à l’extérieur du territoire irakien. A certaines occasions, les services secrets irakiens ont pu s’attaquer aux ennemis du régime en soutenant des groupes terroristes internationaux non gouvernementaux. Le régime de Saddam coopérait souvent directement avec les groupes terroristes quand il considérait qu’ils pouvaient aider les intérêts de l’Irak à long terme. De nombreux mémos ont enregistré les relations du régime avec les organisations terroristes palestiniennes. Un des documents retrouvés montre que Saddam apportait un soutien financier aux familles des terroristes de la Bande de Gaza. Le terrorisme sponsorisé par l’Etat devint une telle habitude du pouvoir irakien que des procédés bureaucratiques élaborés furent mis au point pour suivre les progrès du recrutement, de l’entraînement et du financement des terroristes. Le régime a entre autres certifié et entraîné des terroristes aux explosions de voiture et aux attentats suicides en 1999 et 2000.
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Depuis le début de son ascension vers le pouvoir, Saddam avait comme but de changer l’équilibre du pouvoir dans la région en faveur de l’Irak. Après la guerre du Golfe en 1991, la poursuite de cet objectif a incité Saddam et son régime à accroître leur coopération avec les fondamentalistes islamistes et les organisations terroristes affiliées. Les documents retrouvés indiquent que l’utilisation du terrorisme est devenue une pratique standard bien que pas toujours couronnée de succès. De 1991 à 2003 on a considéré que le soutien, la direction et l’exécution d’actes de terrorisme était un élément-clé du pouvoir étatique.
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Cette étude des archives irakiennes du gouvernement de Saddam menée par l’IPP réaffirme les liens avérés entre le régime de Saddam Hussein et les organisations terroristes. Mais elle remet en question les affirmations du gouvernement Bush utilisées pour obtenir le soutien du peuple américain et d’une partie de la communauté internationale. Contrairement à ce qui a été annoncé en 2003, Saddam n’était pas allié à Al-Qaïda et il était même très hostile envers cette organisation décidée à renverser son régime jugé trop laïc. Quant au soutien de terroristes par l’Irak, même s’il doit être fermement condamné, il représentait surtout un danger pour les citoyens irakiens en Irak ou dans les pays limitrophes et pour Israël, mais pas pour les intérêts américains trop difficiles à attaquer.
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Egger Ph.